Sud Ouest 16 juillet 2012

Pour le député Gilles Savary, spécialiste des transports, le GPSO risque d'être différé quand à la LGV Limoges Poitiers, il n'en parle même pas

Gilles Savary : « Comment va-t-on indemniser les gens qui sont sur les tracés et qui ne sont pas encore expropriables ? »Gilles Savary : « Comment va-t-on indemniser les gens qui sont sur les tracés et qui ne sont pas encore expropriables ? » (PHOTO ARCHIVES fabien cottereau)

Nouveau député du Sud-Gironde, Gilles Savary siège dans la commission développement durable et de l'aménagement du territoire à l'Assemblée nationale. Fin spécialiste des transports , il fut commissaire européen chargé des transports, il revient sur le GPSO (Grand projet ferroviaire du Sud Ouest) qui prévoit la construction de deux lignes LGV Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Hendaye.

« Sud Ouest ». Que pensez-vous des récents propos de Jérôme Cahuzac, ministre du Budget, annonçant que « le gouvernement n'aurait d'autre choix que d'abandonner certains projets » d'infrastructures ?

Gilles Savary. J'en appelle comme lui à une clarification. Le gouvernement a décidé d'évaluer les différents projets du Snit (Schéma national des infrastructures de transport) dont fait partie le GPSO. C'est un exercice d'un grand courage. Le Snit, imaginé par Jean-Louis Borloo, est une bulle de promesses spéculatives avec des documents non financés mais des tracés bien réels eux. On arrive à l'épreuve de vérité aujourd'hui.

Celle des financements ?

Rien qu'en réalisant les quatre projets du Snit dont le coup est lancé - le bouclage de la LGV Est, la LGV Pays de Loire-Bretagne, le contournement Nîmes Montpellier et la LGV Bordeaux-Tours - la dette ferroviaire va passer de 31 à 60,8 milliards d'euros. Face à cette situation, il y a une grande tentation d'abandonner les autres projets. Ceux du GPSO risquent d'être très longuement différés.

Quid des collectivités du GPSO qui financent la LGV Bordeaux-Tours et qui ont conditionné leurs aides à la réalisation des lignes vers Toulouse et Hendaye ?

Si on abandonne le GPSO, 400 à 500 millions d'euros devront être financés par quelqu'un d'autre. Il serait bon que l'État revoie dans cette remise à plat du Snit les compétences de chacun. La participation du Conseil général de Gironde à la LGV Bordeaux-Tours est son plus gros poste d'endettement alors que c'est hors de ses compétences. Nous avons aussi à financer des collèges, des MDSI, etc. Face à l'effet ciseau financier que nous vivons actuellement, je suis circonspect sur le fait que la collectivité aille plus loin.

Ces deux lignes ferroviaires restent-elles pertinentes à vos yeux ?

Oui. La ligne Bordeaux-Toulouse est rentable car elle permettra de faire basculer une partie du transport aérien vers le ferroviaire. Cela dégagera de la place pour Airbus et permettra de maintenir ses activités sur place et non de les délocaliser vers Hambourg. Le projet vers Hendaye libérera un corridor de fret vers l'Espagne, chose indispensable quand on voit le mur de camions sur cet axe.

Ce dernier projet a-t-il un sens s'il n'est pas connecté à l'Espagne qui a gelé son projet de LGV Madrid-Irún ?

Ce gel est pour deux ou trois ans, les Espagnols arriveront plus vite que nous à la frontière. Mais est-ce que des lignes à 340 km/h pourront rouler sur leur réseau ? Cela semble peu probable au vu des tracés. Pourquoi ne pas faire des projets LGV en France plus light ? Cela marche en Allemagne où les LGV roulent à 280 km/h. On peut faire des lignes à moins grande vitesse. Cela coûtera moins cher en infrastructures et fera plus jouer la concurrence pour le choix des rames.

Quelles sont aujourd'hui les priorités dans ce nouveau contexte ?

D'abord découpler les lignes Langon-Bordeaux et Montauban-Toulouse du projet GPSO. Elles ont besoin d'être modernisées rapidement. Autre question que j'ai posée au ministre des Transports : comment va-t-on indemniser les gens qui sont sur les tracés et qui ne sont pas encore expropriables ? Ils sont en état de spoliation. Il faudra s'y pencher si on diffère les projets.